Le gouvernement tchèque a donné son feu vert définitif à la construction de nouveaux réacteurs nucléaires sur le site de Dukovany, pour un montant estimé à 18 milliards d’euros. L’annonce met un terme à un processus d’appel d’offres très disputé, auquel participait également le français EDF, finalement écarté.
Un contrat majeur pour le nucléaire européen
C’est le groupe sud-coréen KHNP (Korea Hydro & Nuclear Power), filiale de KEPCO, qui a été désigné vainqueur de l’appel d’offres lancé par l’énergéticien tchèque CEZ. Le projet porte sur la construction d’un réacteur de type APR1000, avec possibilité d’en ajouter trois autres sur les sites de Dukovany et Temelin à l’avenir.
La République tchèque vise à sécuriser son approvisionnement électrique à long terme et réduire sa dépendance au charbon. Le nucléaire représente déjà près de 35 % de sa production nationale, et ce projet renforcera davantage cette part.
« Il s’agit de l’investissement énergétique le plus stratégique de notre histoire récente », a déclaré Jozef Síkela, ministre tchèque de l’Industrie.
EDF officiellement déboutée
Le groupe EDF avait formé un recours contre son éviction de la phase finale de sélection, estimant avoir présenté une offre compétitive basée sur l’EPR1200. Ce recours a été rejeté par l’Office tchèque pour la protection de la concurrence.
Ce revers intervient dans un contexte de concurrence internationale accrue sur les projets nucléaires civils, où les technologies coréennes et russes rivalisent avec les offres françaises et américaines.
Malgré cette défaite, EDF poursuit d’autres projets dans l’Union européenne, notamment en Pologne, en Slovénie et bien sûr en France, dans le cadre du programme de relance nucléaire souhaité par l’exécutif.
Une avancée stratégique pour l’Europe centrale
Le projet de Dukovany s’inscrit dans une dynamique plus large en Europe centrale, où plusieurs pays réaffirment leur volonté de recourir au nucléaire pour atteindre leurs objectifs climatiques et énergétiques.
Outre la Tchéquie, la Pologne, la Slovaquie et la Hongrie multiplient les initiatives pour développer ou renouveler leur parc nucléaire, avec le soutien de fonds européens pour la transition.
La guerre en Ukraine et la crise énergétique de 2022-2023 ont renforcé la perception du nucléaire comme une solution de souveraineté énergétique, moins vulnérable que le gaz importé.
Une réalisation attendue d’ici 2036
La construction du premier réacteur doit débuter en 2029 pour une mise en service prévue en 2036. Le chantier mobilisera plusieurs milliers d’emplois directs et indirects, notamment dans l’ingénierie, les équipements lourds et les travaux publics.
Le consortium sud-coréen s’est engagé à recourir à 60 % de sous-traitants locaux, ce qui a pesé dans la balance selon CEZ, opérateur historique du parc électrique tchèque.
Cette annonce confirme le retour en force du nucléaire dans le mix énergétique européen, en particulier dans les pays de l’Est, plus réticents à dépendre des énergies fossiles russes ou à miser exclusivement sur l’éolien et le solaire.