Prix du baril en baisse à 65 $ : pourquoi les prix à la pompe résistent encore ?

Le baril de Brent glisse vers 65 $. Intuitivement, les conducteurs s’attendent à voir les prix en station reculer dans les mêmes proportions. En pratique, la chaîne de formation du prix d’un litre de carburant est plus complexe. Entre la cotation du brut, l’achat (souvent à terme), le raffinage, la logistique et la distribution, plusieurs maillons atténuent ou retardent la baisse.

Les chiffres du jour : des baisses… et des résistances

Indicateurs moyens nationaux à date (calculs prix-carburant.eu) :

Variations jour → jour : Gazole -0,9 c, E10 -1,2 c, SP95 +1,5 c, SP98 -1,9 c, E85 -1,5 c, GPLc +0,1 c. Écart vs moyenne semaine : Gazole -0,7 c, E10 -1,0 c, SP95 +2,0 c, SP98 -1,8 c, E85 -1,4 c, GPLc 0,0 c.

Le baril à 65 $ n’est qu’un morceau du puzzle

Le Brent est la référence internationale pour le pétrole brut. Quand il recule vers 65 $, l’intuition veut que l’essence et le gazole baissent « au même rythme ». En réalité, le prix en station dépend d’abord du coût des produits raffinés (gazole, SP95/E10, SP98) sur les hubs européens (Rotterdam, Anvers, Méditerranée), et non du brut seul.

Des délais de transmission inévitables

Les distributeurs écoulent des stocks achetés quelques jours à plusieurs semaines auparavant. Tant que ces volumes – payés plus cher – ne sont pas renouvelés, la baisse récente du brut ne peut pas se refléter pleinement à la pompe. Le temps logistique amortit la descente… comme il amortit les hausses.

Produits raffinés ≠ brut

Un baril moins cher ne garantit pas un litre raffiné moins cher. Selon la saison, les arbitrages d’import/export, la maintenance de raffineries ou la demande régionale, le gazole ou les essences peuvent rester tendus et se découpler du mouvement du brut.

La structure du prix en France : la fiscalité pèse lourd

En France, plus de la moitié du prix payé à la pompe correspond à la fiscalité : TICPE (montant fixe par litre) et TVA (20 % appliquée aussi sur la TICPE). Même si la partie « produit » recule de quelques centimes, l’addition ne baisse pas dans les mêmes proportions car la composante fiscale reste élevée.

Coûts fixes : raffinage, transport, distribution

Raffiner, stocker, transporter et vendre un carburant mobilise des coûts fixes (énergie, maintenance, personnels, logistique). Ces postes évoluent peu au gré des à-coups du brut. Les marges de distribution en France demeurent généralement faibles : elles n’expliquent pas, à elles seules, l’écart observé entre le baril et la pompe.

L’euro/dollar peut effacer une partie de la baisse

Le pétrole et de nombreux flux de produits raffinés se paient en dollars. Entre fin septembre et début octobre 2025, le taux de change est resté stable autour de 1 € ≈ 1,17–1,173 $. Concrètement, un Brent coté à 65 $ correspondait donc à environ 55,6 € le baril. Ce niveau est inférieur aux ~ 59,8 € observés quand le baril valait 70 $ quelques jours plus tôt. Autrement dit, l’effet devise n’a pas effacé la baisse : au contraire, la légère fermeté de l’euro sur la période a amplifié la détente en euros. L’impact du change existe, mais il est marginal par rapport aux autres facteurs (fiscalité, raffinage, logistique, inertie des stocks) qui expliquent pourquoi les prix à la pompe ne suivent pas immédiatement la courbe du brut.

Lecture par carburant : ce que disent les moyennes

• Gazole : 1,649 €, baisse légère vs hier (-0,9 c) et vs la semaine (-0,7 c). Le marché de gros diesel peut rester ferme par périodes, malgré un brut plus bas.
• E10 : 1,711 €, -1,2 c sur un jour et -1,0 c vs la semaine. Tension en recul modéré sur les mélanges essence-éthanol.
• SP95 : 1,749 €, +1,5 c jour et +2,0 c vs semaine : exemple de découplage temporaire produits raffinés/brut.
• SP98 : 1,804 €, -1,9 c jour et -1,8 c semaine : détente plus nette que sur le SP95.
• E85 : 0,739 €, -1,5 c jour et -1,4 c semaine : prix structurellement bas en relatif, composition différente.
• GPL-c : 0,985 €, +0,1 c jour et 0,0 c vs semaine : quasi-stabilité.