La révolution solaire au Pakistan accentue les inégalités énergétiques

Publié le 29/04/2025 dans News

Une adoption rapide du solaire portée par la crise énergétique

Au Pakistan, la révolution solaire bat son plein. Face à l’explosion des tarifs de l’électricité, provoquée par les exigences du Fonds Monétaire International pour soutenir un secteur énergétique surendetté, les foyers les plus aisés ont trouvé refuge dans l’énergie solaire. À Karachi, sous une chaleur écrasante, des entrepreneurs comme Saad Saleem peuvent désormais faire fonctionner leur climatisation en toute sérénité grâce à des installations solaires privées.

Depuis 2021, la part de l’énergie solaire dans la production nationale a bondi, passant de 4 % à plus de 14 % en 2024, selon l’organisme britannique Ember. C’est près du double de la Chine (8,4 %) et supérieur à l’Inde (7,4 %), positionnant le Pakistan parmi les leaders asiatiques de l’adoption solaire.

Des panneaux solaires... pas pour tout le monde

Cette transition, aussi rapide soit-elle, laisse de côté une grande partie de la population. Pour les classes moyennes urbaines, l’accès à des installations solaires reste hors de portée. Le coût initial – plusieurs milliers de dollars – demeure prohibitif, malgré la baisse des prix des modules solaires chinois importés. Résultat : nombre de familles doivent restreindre leur consommation électrique, incapables d’amortir la flambée des factures.

Pire encore, la majorité des systèmes installés ne sont pas configurés pour réinjecter l’excédent d’électricité dans le réseau national. Un choix technique qui prive l’ensemble de la population d'un partage plus équitable de cette énergie verte et bon marché.

Effet pervers : la hausse des tarifs pour les plus modestes

Le départ des clients fortunés du réseau électrique a fragilisé les compagnies d’électricité pakistanaises. Perdant leurs meilleurs contributeurs, elles ont dû compenser en augmentant encore les prix pour les utilisateurs restants – principalement les classes moyennes et populaires. Cette dynamique accroît encore la fracture énergétique.

Le cabinet de conseil Arzachel, basé à Karachi, souligne que l’effet est similaire à celui observé en Afrique du Sud : une fuite vers l’autoconsommation qui déstabilise le modèle économique traditionnel de la distribution d’énergie.

Le défi d'une régulation adaptée

Cette situation met en lumière un défi majeur pour les autorités : adapter les régulations à la vitesse des transformations technologiques. « Cela pourrait servir d'avertissement pour d’autres pays », explique Haneea Isaad, spécialiste du financement énergétique à l’Institut pour l’Économie Énergétique et l’Analyse Financière. Elle insiste sur la nécessité de politiques qui accompagnent le changement, plutôt que de le subir.

Le ministre pakistanais de l’Énergie, Awais Leghari, a tenté de rassurer, évoquant une baisse récente des tarifs et soulignant l’essor du solaire dans les zones rurales, historiquement déconnectées du réseau. Toutefois, beaucoup reste à faire pour que la transition énergétique bénéficie à tous.

Une transition à deux vitesses

La révolution solaire pakistanaise illustre parfaitement une tendance mondiale : sans régulation adaptée, les transitions énergétiques risquent d’accentuer les inégalités existantes. Au Pakistan, alors que les plus riches se détachent du réseau, les classes moyennes et populaires restent captives d’une électricité conventionnelle de plus en plus coûteuse.

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