Une transition stratégique dans le monde des batteries
La demande mondiale en solutions de stockage d’énergie connaît une croissance fulgurante, tirée par l’essor des énergies renouvelables et des véhicules électriques (VE). En parallèle, un changement important est en train de s’opérer dans les technologies de batteries. De plus en plus de fabricants se tournent vers des chimies ne nécessitant pas de nickel ni de cobalt, deux matériaux historiquement au cœur des batteries lithium-ion.
Le boom du stockage stationnaire redessine la chaîne d’approvisionnement
Selon l’agence Reuters, l’année 2024 a vu une explosion du stockage stationnaire, en particulier en Chine où plus de 300 gigawattheures de batteries ont été installées. Ces installations, destinées à équilibrer la production intermittente du solaire et de l’éolien, ne sont plus dominées par les cellules à base de nickel-manganèse-cobalt (NMC), mais par les batteries lithium-fer-phosphate (LFP).
Les batteries LFP, moins coûteuses, ne nécessitent ni nickel ni cobalt, deux métaux dont l’extraction soulève des enjeux environnementaux et géopolitiques importants. Cette tendance, initialement chinoise, gagne maintenant les États-Unis et l’Europe, où des projets industriels misent eux aussi sur des technologies LFP, voire sur des alternatives encore plus innovantes.
Nickel et cobalt en perte de vitesse
La demande en nickel de qualité batterie, autrefois en forte croissance, est aujourd’hui revue à la baisse. Des groupes comme BHP ou Glencore, majeurs dans la production de ces métaux, commencent à ressentir le contre-choc. Le cabinet Benchmark Mineral Intelligence prévoit que la part du nickel dans le secteur des batteries passera de 46 % en 2023 à moins de 30 % d’ici 2030.
Même chose pour le cobalt, dont les approvisionnements posent problème à cause de leur forte concentration en République Démocratique du Congo, un pays où les conditions d’extraction sont souvent dénoncées. L’abandon progressif de ce métal pourrait également réduire les coûts et améliorer la durabilité éthique des filières batteries.
Des conséquences économiques et géopolitiques
Ce changement n’est pas sans conséquences pour les pays producteurs de ces métaux. L’Indonésie, par exemple, a investi massivement dans la production de nickel destiné aux batteries via des partenariats avec Tesla et CATL. Si la tendance se confirme, ces investissements pourraient devenir moins rentables.
De leur côté, les États-Unis, dans le cadre de l’Inflation Reduction Act, subventionnent de plus en plus les technologies de batteries dites « propres » et domestiques, renforçant le virage vers des solutions comme le sodium-ion ou le lithium-soufre.
Les alternatives : sodium-ion et lithium-soufre en embuscade
Outre le LFP, des technologies alternatives émergent. Les batteries sodium-ion, par exemple, offrent un excellent compromis entre coût, sécurité et densité énergétique, sans utiliser aucun matériau critique. Le géant chinois CATL, qui équipe déjà plusieurs constructeurs de VE, prévoit une commercialisation à grande échelle d’ici fin 2025.
Autre piste : les batteries lithium-soufre, qui pourraient offrir une densité énergétique bien supérieure à celles du lithium-ion classique, avec un impact environnemental réduit.
Une opportunité pour les consommateurs européens
Le secteur automobile suit cette évolution de près. Si les modèles haut de gamme privilégient encore les batteries NMC pour leur autonomie, les véhicules urbains et utilitaires se tournent massivement vers les technologies LFP. Cela s’observe notamment dans les modèles commercialisés par BYD, Tesla (pour ses Model 3 en Chine), ou encore Renault.
Cette bascule est également essentielle pour la transition énergétique. Le stockage stationnaire bon marché est la clé pour assurer une stabilité du réseau en cas de pic ou de creux de production solaire ou éolienne. C’est aussi un atout pour les territoires insulaires ou isolés qui veulent réduire leur dépendance aux énergies fossiles.
Pour les particuliers et les entreprises européennes, cette évolution pourrait signifier à terme une baisse des coûts d’achat de solutions de stockage ou de véhicules électriques. D’autant plus que la production de batteries LFP est en pleine expansion en Europe, avec des gigafactories en cours de construction en France, en Allemagne et en Hongrie.
En parallèle, l’évolution des carburants et des solutions de recharge électrique continue de faire évoluer le paysage énergétique. Pour suivre les dernières tendances sur les carburants en France, consultez nos articles dédiés.