Des biocarburants désormais incontournables dans l’aérien
Depuis janvier 2022, les compagnies aériennes opérant en France sont tenues d’incorporer une proportion croissante de carburants durables d’aviation (SAF, Sustainable Aviation Fuel) dans leurs pleins. En 2025, le seuil est fixé à 2 %, mais il atteindra 5 % en 2030 selon le règlement européen ReFuelEU.
Ces biocarburants, produits à partir d’huiles usagées, de déchets ou de résidus agricoles, sont considérés comme des alternatives décarbonées au kérosène classique. Leur usage est crucial pour que l’aviation respecte ses objectifs climatiques.
Une offre très limitée, des prix qui explosent
Le principal problème reste la rareté de l’offre. En 2024, la production mondiale de carburants aéronautiques durables couvre moins de 0,1 % des besoins du secteur. La conséquence directe : un prix du SAF 3 à 5 fois supérieur à celui du kérosène fossile.
Selon les dernières estimations citées par Les Échos, le litre de biocarburant peut dépasser 2,70 euros, contre environ 0,60 euro pour le kérosène. Une situation dénoncée par la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (FNAM), qui déplore un manque de soutien public et une menace sur la compétitivité des compagnies françaises.
Des taxes françaises qui aggravent la facture
Outre le prix du carburant, les compagnies pointent du doigt une spécificité française : la taxation du SAF. En effet, alors que le kérosène reste exonéré de taxes, le carburant durable, lui, est soumis à la TICPE (Taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques), alourdissant encore son coût d’utilisation.
Un paradoxe dénoncé par plusieurs acteurs du secteur qui réclament un alignement fiscal ou un mécanisme d’exonération temporaire pour accélérer la transition écologique sans pénaliser les opérateurs.
Un enjeu stratégique pour la transition énergétique
La Commission européenne mise sur les SAF pour atteindre la neutralité carbone du secteur aérien d’ici 2050. Mais le retard de la production et les coûts prohibitifs soulèvent des inquiétudes quant à l’atteinte de ces objectifs.
La FNAM appelle donc à :
- une montée en puissance rapide de la production industrielle de SAF en Europe ;
- des mécanismes de soutien public, à l’image des subventions ou des quotas gratuits de CO₂ ;
- un ajustement réglementaire pour lisser les hausses de coûts.
Un impact potentiel sur le prix des billets
À terme, les compagnies n’excluent pas de répercuter ces surcoûts sur les passagers. Si la tendance actuelle se maintient, le recours accru aux biocarburants pourrait faire grimper le prix moyen d’un billet de plusieurs dizaines d’euros. Une évolution qui poserait la question de l’accessibilité du transport aérien à l’heure de la transition écologique.
Vers un marché européen plus intégré ?
La mise en œuvre de ReFuelEU vise justement à harmoniser les règles entre les États membres, mais aussi à stimuler les investissements dans les infrastructures de production de SAF. La France, bien que pionnière sur certains aspects, risque de voir ses compagnies pénalisées si les coûts ne sont pas maîtrisés.
Le carburant d’aviation durable s’impose donc comme un carburant d’avenir, mais son déploiement reste un défi économique majeur.