L’Allemagne inaugure une centrale flottante produisant du carburant à partir du vent et de l’eau de mer

Une nouvelle ère s’ouvre en mer du Nord : l’Allemagne vient d’inaugurer la toute première centrale flottante capable de produire du carburant liquide à partir d’électricité éolienne et d’eau de mer. Ce projet pionnier allie transition énergétique, autonomie stratégique et innovation technologique.

Une plateforme flottante multi-énergies

Installée au large des côtes allemandes, cette unité flottante convertit l’électricité produite par des éoliennes offshore en hydrogène, puis en carburant liquide de synthèse. L’installation embarque à son bord un électrolyseur, une unité de captation de CO2 atmosphérique, ainsi qu’un réacteur de synthèse du méthanol ou de l’e‑kérosène.

Ce système repose sur la combinaison de trois flux :

• Électricité renouvelable fournie par les parcs éoliens en mer
• Eau de mer désalinisée pour l’électrolyse de l’hydrogène
• CO₂ capté dans l’air pour la synthèse finale

L’unité pilote produira environ 1 000 litres de carburant/jour dans sa phase initiale, avec un objectif d’industrialisation d’ici 2030.

Un projet porté par un consortium industriel allemand

Le projet est le fruit d’un partenariat entre plusieurs acteurs majeurs de l’énergie et de la recherche allemands, dont :

• Le groupe énergétique Uniper
• L’institut Fraunhofer
• Le chantier naval Meyer Werft

L’ensemble est soutenu par le gouvernement fédéral allemand dans le cadre de sa stratégie hydrogène et de la décarbonation des transports lourds (maritime, aérien, fret).

La plateforme, modulaire et autonome, est conçue pour fonctionner de manière isolée en mer pendant plusieurs mois. L’export du carburant vers le continent se fera par navire ou pipeline.

Carburants synthétiques : l’option zéro émission ?

Ce type de carburant, souvent appelé e‑fuel ou carburant de synthèse, pourrait révolutionner le secteur des transports en réduisant drastiquement les émissions nettes de CO2, à condition que l’électricité utilisée soit 100 % renouvelable et que le CO2 soit capté de manière durable (atmosphère ou biomasse).

Les carburants synthétiques sont particulièrement prometteurs pour les secteurs où l’électrification directe est difficile (aviation, transport maritime). Leur production en mer ouvre la voie à de nouveaux modèles de production décentralisée.

Une réponse allemande à la dépendance énergétique

Dans un contexte géopolitique instable et post‑crise énergétique européenne, ce projet vise aussi à renforcer la souveraineté énergétique de l’Allemagne. En diversifiant ses sources de carburant et en misant sur la mer du Nord, Berlin veut réduire sa dépendance aux hydrocarbures importés.

La ministre allemande de l’Économie a salué l’initiative comme « un tournant dans notre stratégie climatique et industrielle ».

Le défi reste de taille : même si la technologie fonctionne, les coûts de production de ces e‑fuels sont encore largement supérieurs aux carburants fossiles. Mais les progrès en cours (efficacité des électrolyseurs, baisse du coût de l’éolien offshore, captage du CO₂) laissent espérer un seuil de rentabilité dans la prochaine décennie.

Le projet allemand pourrait inspirer d’autres initiatives similaires en mer du Nord, mais aussi en Méditerranée ou dans le golfe du Mexique.