Une nouvelle offensive de l’OPEP+ pour reconquérir le marché
Depuis le 3 mai 2025, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs alliés (OPEP+), emmenée par l’Arabie saoudite et la Russie, a enclenché une stratégie offensive : l’augmentation de sa production de brut. Cette décision vise à peser sur les prix mondiaux du pétrole pour mettre sous pression les producteurs américains de pétrole de schiste.
Ce retour à une guerre des parts de marché rappelle les années 2014-2016, période durant laquelle les pays de l’OPEP avaient déjà tenté de rendre non rentable la production nord-américaine. À l’époque, la stratégie avait entraîné une chute des prix à moins de 30 dollars le baril.
Objectif : maintenir le baril sous les 60 dollars
L’OPEP+ cherche cette fois à stabiliser le cours du Brent autour de 60 dollars, un seuil critique pour les producteurs de schiste. Selon les dernières estimations, le coût de rentabilité du pétrole de schiste américain atteint désormais 65 dollars le baril, en raison de l’inflation, de la hausse des salaires dans le secteur et d’un accès au capital plus restreint.
En comparaison, l’Arabie saoudite affiche un coût de production bien inférieur, autour de 10 dollars, tandis que la Russie se situe autour de 20 à 25 dollars. Cette marge de manœuvre permet aux membres de l’OPEP+ de supporter des prix bas plus longtemps… du moins en théorie.
Des économies nationales mises à l’épreuve
Car au-delà des coûts de production, le véritable enjeu réside dans l’équilibre budgétaire des pays exportateurs. Selon le Fonds monétaire international (FMI), la Russie aurait besoin d’un baril à 77 dollars pour équilibrer son budget national. Pour l’Arabie saoudite, ce seuil grimpe à 90 dollars.
La stratégie actuelle revient donc à sacrifier une partie des revenus immédiats dans l’espoir de désorganiser l’industrie pétrolière américaine, souvent plus réactive mais aussi plus vulnérable aux variations de prix. À terme, cela pourrait permettre à l’OPEP+ de reprendre la main sur la fixation des prix mondiaux.
Un pari risqué face à une industrie américaine résiliente
Cependant, le secteur du schiste a évolué. Moins dépendant du financement externe qu’avant, plus sélectif dans ses projets, il pourrait résister plus longtemps qu’attendu. De plus, les États-Unis disposent d’un atout majeur : la flexibilité. Une baisse temporaire de la production ne signifie pas l’arrêt des opérations, et les puits peuvent être réactivés rapidement si les prix remontent.
Reste à savoir si l’OPEP+ dispose de suffisamment de réserves et de cohésion pour maintenir sa stratégie sur le long terme, sans mettre en péril la stabilité économique de ses membres.
Quelles conséquences pour les consommateurs ?
Pour les automobilistes européens et français en particulier, la baisse du prix du pétrole brut pourrait se traduire par un répit à la pompe, même si la fiscalité et les marges des distributeurs en atténuent l’effet. Sur le site prix-carburant.eu, les relevés récents montrent une stabilisation des prix moyens du gazole et du SP95-E10, après une période de baisse continues.
Ce bras de fer énergétique reflète aussi une confrontation géopolitique entre les blocs est et ouest. La Russie cherche à compenser les sanctions économiques occidentales par ses revenus pétroliers, tandis que les États-Unis voient dans le schiste un levier de souveraineté énergétique.
Au cœur de cette bataille : la maîtrise du marché mondial du pétrole, une ressource toujours stratégique malgré l’essor des énergies renouvelables.